20/05/2023 Francia, (France), Grand Est, Mosa (Meuse), Verdun
Écrit par l’équipe Ça m’intéresse
Trois cents jours et trois cents nuits d’enfer.
Les tapis de bombes, la survie dans les tranchées, les combats dans la boue, les gaz asphyxiants: tel sera le quotidien des martyrs du front. Verdun commence alors que le conflit s’enlise depuis dix-huit mois. C’est la bataille phare de la Grande Guerre, le choc de deux titans. Alors que la guerre est mondiale, les Français sont engagés sans alliés sur ce front, et s’opposent aux hommes du Reich allemand, leurs ennemis jurés depuis la défaite de Sedan en 1870. Nous avons décidé de vous faire vivre ce séisme à travers les mots des acteurs des deux camps, soldats et officiers. Les témoignages, tirés de leur journal personnel, de leur correspondance ou de leurs souvenirs, racontent cette incroyable boucherie où 300 000 combattants ont trouvé la mort.
Janvier 1916 : bois des Caures, à 15 kilomètres au nord-est de Verdun
Les lignes allemandes sont à une cinquantaine de mètres. Les soldats français observent à la jumelle l’arrivée régulière de caisses d’artillerie dans le camp ennemi. Les Allemands ont détruit les clochers d’église des villages à proximité du front : visibles de loin, ils auraient pu servir de point de repère à l’artillerie française. « On sent que le coup approche », note le colonel Herbillon, le 28 janvier 1916. Et ce n’est pas une bonne nouvelle. Les défenses françaises du secteur ne sont pas prêtes. Le 16 décembre 1915 déjà, le ministre de la Guerre Gallieni s’inquiétait de l’impréparation à Verdun. « Le réseau de tranchées ne serait pas complété comme il l’est sur la majeure partie du front », écrit-il à Joseph Joffre, le chef d’état-major de l’armée française. Mais ce dernier est persuadé que l’attaque aura lieu directement en Champagne. Le général a même ordonné que l’on désarme la plupart des quinze forts construits dans la Meuse entre 1875 et 1914, afin d’envoyer des pièces d’artillerie lourde sur d’autres fronts. Et d’ajouter en guise de provocation : « Si les Allemands m’attaquent, que ce soit sur Verdun ! » Méprise fatale ! Car dans le camp d’en face, le chef d’état-major allemand Erich von Falkenhayn est au courant de la mauvaise préparation des Français. Il entend « frapper un grand coup » en s’emparant de Verdun, le verrou de protection de la plaine de Champagne, et au-delà, de Paris ! Sûr de lui, il pense en finir rapidement.
21 février 1916, 7 h : un millier de canons sont pointés sur Verdun
140 000 soldats allemands sont prêts à l’assaut. Le Reich a trois millions d’obus en réserve. Les Français en possèdent seulement 15 000. Le calme règne encore. Le lieutenant-colonel Emile Driant, à la tête du 56e bataillon de chasseurs à pied (BCP), est en première ligne. La veille, il a écrit à son épouse : « Comme on se sent peu de chose à ces heures-là ! »
Le déluge de feu allemand « Bon Dieu, qu’est-ce que c’est que ça ? »
21 février, 7 h 15 : les premiers obus tombent sur les Français
« Un horrible bourdonnement de monstrueux insectes déchire furieusement l’air autour de la cagna (abri de tranchée, ndlr), tandis que de formidables explosions à portée de souffle semblent retourner la terre. Bon Dieu, qu’est-ce que c’est que ça ? » s’interroge Marc Stéphane, chasseur du 56e BCP. « Ça », ce sont les obus : un million sont tirés lors de cette première journée. « La violence du feu est telle qu’en sortant de nos abris, nous ne reconnaissons plus le paysage. Il n’y a presque plus d’arbres debout, les trous d’obus ont bouleversé le sol », témoigne le capitaine Seguin, à la tête de la 7e compagnie (59e BCP). « Nous “faisons les morts” couchés pêle-mêle, au fond de la tranchée, par-dessus les morts véritables, les bras étendus, la bouche ouverte, afin de donner aux observateurs l’illusion que tous les défenseurs du village sont tués. » J.-P., lieutenant au 95e régiment d’infanterie (RI).
16 h : 60 000 soldats allemands sortent de leur tranchée
Selon le général allemand Erich von Falkenhayn, ses troupes doivent désormais « marcher sur des cadavres ». Mais, contre toute attente, les Français résistent vaillamment. Le soldat allemand Julius Marx : « En avant, en avant ! On passe à côté d’un dépôt de munitions explosé, terre déchiquetée, hommes morts, chevaux morts. Enfin, on arrive en première ligne. C’est une fosse à hauteur de genou, pas question d’abris. Les grenades hurlent autour de nous, dans toutes les directions, tout le temps. »
17 h : les Allemands ont pris le nord du bois des Caures
Côté français, à minuit, les renforts attendus n’arrivent pas. Le lieutenant Robin, commandant de la 9e compagnie, vient de défendre héroïquement sa position : « Qu’est-ce que je fais là avec mes 80 hommes ? » Le lieutenant-colonel Driant : « Mon pauvre Robin, la consigne est de rester là… »
22 février, 12 h : les sentinelles françaises
« Voilà les Boches ! » armés de lance-flammes, les Allemands pulvérisent les soldats en première ligne. « Laissez-les bien sortir (les Allemands, ndlr) ! On a besoin d’économiser la marchandise. A vingt-cinq pas, tapez-leur dans la gueule ! » ordonne Charles Delve rt ,101e RI. « Je me souviendrai toujours d’un Boche, un gamin qui, me voyant bondir, se mit à genoux pour demander grâce. Trop tard, mon arme s’enfonça et je n’oublierai jamais ses yeux hagards qui me fixaient », raconte Alfred Lievre, soldat au 165e RI. Les Allemands s’emparent du bois des Caures. C’est ensuite au tour du village de Haumont d’être conquis, puis de Brabant-sur-Meuse. La seconde ligne française est dépassée. L’ennemi n’est plus qu’à dix kilomètres de Verdun.
Par sécurité, la police conseille à la population de ne pas toucher ou déplacer ce genre de munitions.
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